C’était en juin. Le beau temps était définitivement arrivé et nous nous sommes dit qu’un petit road trip ne nous ferait pas de tort.
 
Nous sommes donc parties avec un coffre de voiture bien rempli et la naïveté de deux filles nouvellement mamans. Jamais je n’ai pensé que je ferais un changement de couches DANS la valise de l’auto à Kamouraska, ni SUR la valise de l’auto à Baie-St-Paul. Je n’avais pas non plus envisagé que ma douce allaiterait dans l’auto à Notre-Dame-du-Portage ou dans la grande salle commune du traversier entre Rivière-du-Loup et St-Siméon.

Crédit photo : Marie-Pier Allard.

 
Heureusement, personne ne nous a jamais passé de commentaires. Nous avons eu le droit au fameux «Hiiii c’est pas vieux ça!» et au «Hon, elle est donc bien belle!».
Nous avons toutefois vécu une expérience particulière en déjeunant à La Malbaie.
 
En nous attablant devant notre petit déjeuner continental, MP et moi savions déjà que la serveuse était gaga de notre bébé. Une belle madame dans la cinquantaine qui venait nous voir beaucoup trop souvent. Les madames de la table d’à côté n’avaient d’yeux que pour Léane elles aussi.
 
C’est MP qui a amené la coquille de Léane à la table et qui l’avait tournée vers elle. À la fin de mon déjeuner, j’ai pris le bébé dans mes bras, comme ça, parce que c’est ma fille et que je l’aime. La serveuse m’a demandé pour la prendre (ce qui est un peu bizarre), mais je lui ai dit oui. J’en ai profité pour aller me chercher une banane.
 
Serveuse à MP (en parlant de moi) : «C’est la marraine de ton bébé?».

J’espérais en silence que MP dise oui.
 
MP : «Non, c’est sa mère. Elle aussi. On est deux mamans.».
 
Serveuse (en détournant le regard, mal à l’aise) : «Ah oui… L’avez-vous adopté?».

MP : «Non, je l’ai porté.».
 
Silence. Autant chez la serveuse qu’à la table d’à côté. Comme si on venait de dire quelque chose de super tabou. Tout d’un coup, l’intérêt pour le bébé s’est envolé.
 
À la fin du déjeuner, on s'est senties un peu mal, mais on comprenait que ce n’est pas tout le monde qui a déjà croisé une famille homoparentale.
 
La vie m’a alors envoyé un moment que je n’oublierai jamais, comme pour effacer le malaise qui venait de se passer. En sortant de la salle des déjeuners, le bébé dans les bras, nous avons croisé une madame qui m’a regardée, a regardé le bébé et a dit : «Oh mon Dieu, ce bébé-là ressemble donc bien à sa mère!».
 
Et c’est là que mon cœur a fondu, dans un escalier, sur le bord du fleuve.
 

Avez-vous déjà vécu ce genre de moment awkward en tant que famille homoparentale?