Je n’ai jamais apprécié les films de princesses. Ça vient probablement du fait que je n’avais pas le droit d’en regarder à la maison. Les seuls films que j’avais le droit de visionner étaient ceux dans lesquels les héroïnes étaient fortes et indépendantes. Mes modèles étaient Esméralda et Pocahontas. Des femmes qui, fières et libres, n’avaient pas besoin d’attendre après un homme pour être délivrées de leur malheur. Non! en fait, c’étaient elles qui secouraient les princes lorsqu’ils se trouvaient dans des situations périlleuses.
 
J’ai toujours eu l’impression que ces femmes étaient elles-mêmes. Elles n’avaient jamais eu besoin de se transformer en quelque chose qu’elles n’étaient pas pour se faire remarquer par un prince. Elles n’avaient jamais eu à vivre avec l’angoisse des douze coups de minuit et du carrosse qui se transforme en citrouille; de la robe qui se transforme en haillons. Elles n’avaient jamais eu à attendre cent ans pour qu’un homme vienne les délivrer du profond sommeil dans lequel elles avaient été plongées. Elles n’avaient jamais eu à attendre le baiser de quelqu’un pour vivre.
 
En plus, leur vie semblait tellement plus intéressante que celles de Cendrillon et Blanche-Neige! L’une faisait du canot dans les rapides et avait un raton laveur comme animal de compagnie et l’autre jouait du tambourin dans les rues de Paris.

Nous étions loin de celle qui faisait le ménage et la popote pour sept hommes et de celle qui faisait la même chose pour deux vilaines belles-sœurs et une méchante belle-mère. Nous étions loin d’Ariel qui, ayant perdu la voix, avait dû réussir à séduire le prince en moins de trois jours (pas trois ans, trois jours(!)) par ses manières et sa beauté. Il est bien connu que l’amour ne passe pas par les discussions partagées avec quelqu’un, mais passe par l’apparence. T'sais.
 
Personnellement, je trouve que ces films sont vecteurs de stéréotypes et de sexisme. Ils montrent à nos filles qu’il ne suffit que d’être belle (et de faire la belle) pour dénicher un prince, être heureuse, se marier et avoir beaucoup d’enfants. Il ne suffit que d’attendre dans un cercueil en verre durant cent ans pour qu’un valeureux prince vienne nous sauver. Heille, qu'aurait fait Aurore si le prince était mort calciné? Elle aurait attendu un autre siècle?  De plus, si je dormais et que je me réveillais avec la bouche d’un inconnu sur la mienne, je serais loin d’être enchantée… (Je dis ça, je dis rien.)
 
Ils montrent aussi aux hommes qu’ils doivent posséder un beau cheval blanc et une belle épée pour être considérés comme un prince, comme un vrai homme. Ils doivent être forts! Ils doivent savoir se battre! Et ce, sans que ça ait un lien avec un contexte sociohistorique quelconque.
 
Certaines personnes disent que les enfants ne voient pas ce côté-là de ce genre de récits. Que cela n’a pas d’influence sur eux plus tard. Que les personnes comme moi exagèrent. C’est peut-être vrai. En effet, je ne crois pas qu’écouter Cendrillon rende les filles nunuches plus tard.

Cependant, j’ai cru remarquer (il n’y a rien de scientifique là-dedans) que les femmes qui s’attendent à ce que tout leur soit dû sans qu’elles fassent quoi que ce soit, qui regardent la marque du véhicule avant l’homme qui le conduit et qui regarde le portefeuille de l’autre pour calculer leur intérêt sont aussi celles qui ne jurent que par Cendrillon, Ariel, Aurore, name it.
 
Une fois à l’âge adulte, que retenons-nous de ce genre de films, inconsciemment? Sois belle et tu auras tout? Que pour être un vrai prince, tu dois absolument avoir un gros château? Que tu dois devenir une femme que tu n’es pas pour réussir à attirer un prince? Que la personne que tu es n’est pas suffisante? Qu’il y a une date d’expiration à l’intérêt que te porte un homme et que cette date sera celle à laquelle tu ramèneras ta robe BCBG à la boutique après ta soirée?
 
En tant qu’adulte, je les vois, ces côtés-là et c’est pourquoi ce genre de films n’entrera pas chez moi. Que pensez-vous de ce genre de films?

P.-S. : Je sais que nous pourrions en dire autant de tous les films valorisant la violence, mais les films de princesse sont souvent perçus comme étant anodins et c'est sur ce point que je voulais insister.