Je suis une maman extraordinaire. Bravo championne!  Non, pas une mère parfaite. Une mère extra-ordinaire. Je t’explique! Lorsque mon conjoint et moi avons décidé de fonder une famille, nous avons aspiré au poste de parents ordinaires.  Pourtant,  il y a presque six ans, je donnais naissance à Ariane. Un bébé attendu comme une princesse, mais qui allait finalement nous apporter à des kilomètres du conte de fées.
 
Sa naissance devait la mener à des promenades en poussette sur le bord du fleuve. C’est plutôt l’autoroute 20, que nous avons parcourue tant de fois, pour rendre visite aux spécialistes de Montréal.
 
Si la maladie génétique, l’albinisme oculaire, a été identifiée dès ses premiers mois de vie, il faudra attendre plus de 3 ans pour recevoir un rapport qui nous confirmait l’autisme de notre fille.
 
« Donc ta fille est enfant unique? » Je l’attendais celle-là! Non, je suis la maman de trois enfants. Ariane a un frère de 4 ans et demi qui se nomme Justin et une sœur de 15 mois qui porte le populaire prénom de Livia.
 
Ça étonne les gens, lorsqu’ils réalisent que, malgré la différence de notre aînée, nous avons eu d’autres enfants. Que l’on soit encore un couple aussi surprend, mais ça, on s’en reparle une autre fois.
 
Justin.
 
Mon fils s’est fait un nid dans mon ventre le soir de ma fête. Trop de sushis, trop de vin ont mené à des rapprochements et à Justin. Ariane avait à peine 5 mois donc je ne savais pas que son existence serait à ce point remplie d’extras. Bien sûr, pendant que Justin faisait pousser ma bedaine, les choses se précisaient pour Ariane. Des précisions plutôt sombres qui faisaient craindre bien des choses.
 
La venue de Justin était critiquée. Remise en question, mais pour moi il n’était pas question de sacrifier mon deuxième enfant. J’allais y arriver. Et si lui aussi il naissait avec un extra? Une question que je me posais très peu, mais qui semblait une fatalité dessinée pour plusieurs. Pourtant, Juju a fait son arrivée en trois heures et dans une forme splendide. Les années ont passé et ni sa santé, ni son développement ne nous ont inquiétés.
 
… mais Livia ?
 
Livia n’était pas un bébé prévu. J’avais joué à la roulette russe de la différence une fois et j’avais gagné. Deux fois? Non merci! Pourtant, j’allais devoir rejouer. Le timing n’était pas bon du tout. Nous étions en pleine mise en place de technique d’intervention pour Ariane et elle commençait la garderie à temps plein. Justin fréquentait déjà un service de garde, donc il était temps pour moi de retourner travailler. De plus, mon conjoint démontrait des signes de dépression majeure. Quand j’ai compris que j’étais enceinte, j’ai paniqué. Ce serait trop!  

Je pouvais passer à travers bien des choses, mais les remises en doute et les jugements sur ce bébé à venir, non merci. Je voyais le drame d’ici! Justin était en parfaite santé, Ariane non. De quel côté pencherait ce bébé? Je ne le savais pas et je ne voulais pas que l’on m’en parle.

Solution? N’annonce pas ta grossesse et passe les tests nécessaires pour que quand les questions viendront, tu aies toutes les réponses. Presque toutes, car la science est rendue loin, mais pas tant que ça.

Je cachais mon ventre sous mon gros manteau d’hiver. Comme j’habite à 7 h de route de ma famille et de la majorité de mes amies, ça été relativement facile de leur cacher. Seule ma sœur a déjoué mes plans. J’en étais à 7 mois de grossesse et j’avais rendez-vous pour ma dernière échographie chez Procréa. Je l’ai donc accueilli à la maison avec des vêtements amples en lui demandant de m’accompagner pour un rendez-vous. Infirmière en obstétrique, elle connaissait bien cette clinique.

Elle ne comprenait pas mon secret, mais quand je lui ai expliqué, elle m’a donné raison. En effet, je n’aurais pas passé une belle grossesse si je l’avais annoncée. J’aurais été bombardé par les inquiétudes des autres, alors que le sujet ne les concernait pas.

Les gens ne le réalisent pas, mais leur jugement et leur harcèlement brisent des moments qui ne reviendront jamais. Grâce à mon secret, j’ai eu une grossesse sans jugement, sans harcèlement et j’en ai profité pleinement. By the way, simplement pour l’annonce de mon accouchement et la stupéfaction de mes amies sur Facebook, le secret en valait le coup.

Livia a 15 mois aujourd’hui. Elle n’a aucun retard de développement et est en parfaite santé. J’ai gagné à la roulette russe de la différence une seconde fois.  Ariane et Justin aiment beaucoup leur petite sœur et nous, en tant que parents, sommes très heureux de vivre l’ordinaire et les extras à la fois.

Avez-vous reçu des jugements durant votre grossesse? Comment avez-vous vécu cette situation?