La semaine dernière, aux Emmys, Viola Davis a livré un discours puissant sur la présence (ou plutôt l'absence) d'actrices noires à la télévision américaine. Pendant ce temps, aux Gémeaux, les nominés se félicitaient les uns les autres sur leur teint de porcelaine. Parce que oui, notre télévision immaculée reflète un Québec pris dans les années 50. La preuve? On refait des shows des années 50. Oui, moi, quand j'entends qu'on ressort Séraphin de son armoire pour le dépoussiérer, j'entends surtout : « Hé, qu'est-ce qu'on était bien entre Blancs! »

Crédit : Les Belles Histoires des pays d'en haut

On ne va pas se mentir, comme dirait l'autre, on est sacrément en retard en ce qui concerne la représentation des minorités dans les médias. Et on ne se contente pas d'invisibiliser les minorités visibles. Les rares rôles offerts par les productions québécoises aux acteurs de la diversité sont : hijabiste, terroriste, criminel de gang de rue, femme de ménage... T'sais, des rôles complexes, édifiants, qui retournent les stéréotypes et nous remettent en question dans nos représentations de l'Autre.

À la limite, le citoyen adulte qui voit qu'il n'a droit ni à son image, ni à sa voix dans la cité se résigne et passe à autre chose. Je suis une grande fille : voir qu'on diabolise les Arabes dans les médias ne me fera pas douter de ma valeur en tant que personne. Ça me fera douter de la valeur des médias, mais on s'éloigne.

Crédit photo : Raven Ward/ Giphy

Sauf qu'il n'y a pas que les adultes. Étrangement, même les « ethnies » font des enfants qui, eux aussi, regardent les émissions qui leur sont (à peu près) destinées. On pourrait croire que c'est inconséquent s'ils ne se voient pas à la télé ou s'ils voient les personnages qui leur ressemblent faire quelque chose de mal.

Ça ne l'est pas. Les études le disent : la télévision augmente l'estime de soi des petits garçons blancs et diminuent celle des enfants bruns et des petites filles (ce qui mérite aussi un coup de gueule senti, honnêtement). Il est clair que ces résultats sont dus à l'absence de modèles à l'écran, et les producteurs américains semblent faire de réels efforts pour représenter correctement la société dans laquelle les gamins grandissent.

Par contre, les chaînes généralistes québécoises considèrent encore que, quand on dit aux enfants que tout leur est possible, il faut ajouter « si t’es blanc ». C'est la seule façon dont je peux m'expliquer l'offre télévisuelle. On importe : des dessins animés sur les Vikings ou le Moyen Âge anglais. On produit : des émissions dans lesquelles on ne retrouve que des acteurs blancs, toujours, en 2015. J'insiste tout de même : même les shows qui sortent cette année n'incluent aucun personnage racisé.

Crédit photo : Mulan
 

Alors oui, je me désole, je capote, je m'insurge, je boycotte, je zappe sur une émission, traduite, mais qui a le mérite de me montrer des enfants qui ressemblent à l'Organisation des Nations Unies qui s'amuse dans le parc en face. Des enfants qui deviendront clairement autre chose que terroriste, femme de ménage ou criminel.

Déplorez-vous, comme moi, le manque de diversité dans les émissions et films pour enfant?