À ma grande amie,

Depuis toujours, on nous fait miroiter un modèle de vie qui n’existe pas, tu le sais et je le sais. Tu as toujours été à des kilomètres du modèle conventionnel, des moules serrés dans lesquels tu te sentais prise. C’était pas pour toi. J’ai toujours eu de l’admiration pour ta facilité à t’en détacher, tu es une battante, une vraie.

Tu es si belle aujourd’hui, avec ton début de bedaine qui ne paraît pas encore. Avec tes yeux pleins d’espoir qui, malgré toi, sont aussi marqués d’inquiétude. Ça aurait été si simple de suivre le modèle, le grand amour, la famille parfaite, la grossesse voulue que tout le monde aurait acclamé sans réfléchir. Mais non, la réalité ce n’est pas comme ça et ce tout petit bout de vie qui pousse dans ton ventre, tu ne l’as pas vu venir.

C’est vrai, c’est pas le meilleur timing. Le papa ne veut pas être papa, t’as pas de maison parfaite ni de compte en banque bien garni. C’est vrai que t’avais pas imaginé ça comme ça, pas tout de suite, t’aurais voulu être prête. Mais est-ce qu’on est vraiment prête un jour? Qui a dit que faire comme tout le monde était moins épeurant?

Les gens, et même tes amis qui t’aiment très fort, sont maladroits. Leur inquiétude et leur réflexe naturel de comparer ta situation à celles qu’on voit dans les films les empêchent d’être là pour toi. Ben oui, élever un enfant, c’est dur, toute seule encore plus. Oui, ta vie va changer du tout au tout et quelquefois tu auras peur, quelquefois tu auras l’impression d’avoir le poids de la terre sur tes épaules. Mais rien de tout cela ne permet à qui que ce soit de te faire croire que tu ne seras pas capable. Tu mérites bien mieux que tous ces airs déçus et découragés, je sais qu’au fond, tu le sais.

Tu as le droit d’avoir peur, tu as le droit de tout remettre en question, mais n’oublie pas que moi je serai toujours là. Laisse-les parler, les gens, ils n’ont pas la moindre idée de la force que tu as en toi, ils n’ont pas idée de la maman incroyable que tu feras. Prouve-leur qu’ils ont tort, comme tu as toujours su si bien le faire.

Tu verras, un jour, tu repenseras à tout ça et tu pourras être fière de dire à tous ces gens « Maudit qu’j’ai bien fait de pas vous écouter! »

Je t'aime, ma belle amie.