La dernière semaine, j’avoue, j’en pouvais plus. Ostéopathe, acupuncteur, tout y est passé pour te faire sortir et enfin te rencontrer. J’me sentais comme un gros phoque qu’on a laissé sur la terre ferme et qui peine à se bouger.

Une nuit, ton frère s’est réveillé en pleurant. Quand je l’ai touché, j’ai tout de suite su qu’il faisait de la fièvre. Et que t’allais arriver bientôt. C’était clair que ça prenait un petit défi. Les plans d’accouchement zen dans le confort de notre foyer, beaucoup trop simples!

On s’est ramassé à l’urgence. Ton frère avait des boutons qui piquaient et il n'arrivait plus à s’endurer. Ton papa et moi, nous voulions être certains que c’était pas un virus dangereux pour toi. Verdict : cousin du pied-main-bouche. Rien à faire vraiment. Il fallait juste le soulager le mieux possible.


C'était comme ça. Sans arrêt. Mais en moins cute, avec plus de larmes, de cris, de boutons.
Crédit : Giphy

Deuxième nuit. Papa et moi, on se relaie ton frère-cactus. Vers 4 h, pendant que je le berçais, ce qui se passe dans mon ventre, tout à coup, est différent des habituels coups de pieds. Je laisse passer un peu de temps, le message est juste plus clair : tu t’en viens.

J’essaie le classique bain. Pas de ralentissement. Je vais bien te donner naissance avec un manque de deux nuits de sommeil. Tu t’es aussi décidé en plein changement de quart de garde des sages-femmes. Après quelques échanges téléphoniques, il est convenu que la nôtre sera là dans une heure.

Ton frère quitte aux aurores avec grand-papa, ses p'tites crèmes, sa p’tite vache et son avoine pour le bain dans son petit sac à dos. Mon père me croit à peine que j’ai des contractions tellement je suis en mode organisation.


T'es sûre que ton bébé s'en vient??
Crédit : Giphy

Une fois le calme installé dans la maison, je m’allonge en attendant Véronique, celle-là même qui avait accueilli ton frère quelques mois plus tôt, à la maison de naissance. Cette fois-ci, pas de promenade en auto. Juste mon lit et un semblant de repos entre les contractions qui gagnent du terrain et me font grogner.

Aussitôt que le matériel est prêt, je m’installe sur le ballon. Puis, retour au bain. Il manque d’eau chaude. Papa stresse. Il faut en faire bouillir sur le poêle pour que ce soit assez chaud pour toi. C’est presque Les Filles de Caleb.

Tu es si particulier déjà. À chaque contraction, je te sens faire ton chemin dans mon corps. Quelle sensation magique. Mes membranes ne sont pas rompues, alors Véronique le fait manuellement. « Belle broche à tricoter! » Je trouve encore le moyen de dire des niaiseries rendue là.

Après, ça va vite. Un gros cinq minutes de poussée! Même pas de pause entre ta tête qui sort et le reste de ton corps. Je ne pensais pas y arriver, mais je t’ai attrapé, toute seule, à quatre pattes dans mon bain. Ta petite tête entre mes mains, puis posée sur mon cœur, à jamais. Mon vigoureux garçon.


Te voilà, avec ton petit 3 jours de vie.
Crédit : Cynthia Chartier

 

Tu as déjà neuf mois. Tu as autant d’expérience maintenant entre la vie « en dedans » et celle au grand air. Tu as bien appris à me transformer en guimauve avec ton sourire. Je t’aime.

Avez-vous, vous aussi, accouché à la maison?