D’abord, je connaissais rien aux allergies. Personne de ma famille proche n’en avait, ni de mon entourage. J’avais vu un reportage à la télé et en toute honnêteté, ça avait l’air pas mal galère. Le genre de truc que tu souhaites à personne.
 
J’avais jamais pensé que ça tomberait sur le mien. Après des mois à me questionner sur son eczéma, puis après une réaction alimentaire au Mexique qui m’a fait la plus grosse peur de maman au monde, l’allergologue allait trancher. On sortait de là, lui, les petits bras marqués au feutre des lettres K, O, L, F, et moi, une prescription d’Epipen en main. Je me répétais en boucle le cours 101 donné par l’infirmière en pas plus de 40 secondes.
 
Quand derrière son bureau la docteure m’a dit : à ce jour, votre fils est allergique aux œufs, aux noix et aux kiwis, je me sentais ironiquement soulagée. Ça venait enfin confirmer un doute que je portais depuis quelque temps, et en plus ça me donnait le papier pour définitivement couper certains aliments à la garderie. C’est une fois à la maison que j’ai réalisé l’ampleur de cette nouvelle, un choc à retardement. J’avais mille et une questions que je n’avais pas posées au médecin dans son cabinet. Les noix, c’est toutes les noix? Il n’aurait jamais la chance de manger des toasts au Nutella? À partir d’aujourd’hui, je devrais donc vérifier tout ce que mon fils allait ingérer? Fini les restos relax de lundi soir parce qu’on n’a pas envie de cuisiner, fini les voyages sur une île à des kilomètres d’un hôpital? Je me retrouvais bien seule et mal équipée.
 
Je devais me rendre à l’évidence; je n’allais plus jamais avoir la tête tranquille. À partir de maintenant, il fallait développer des réflexes que je n’avais pas. Traîner l’Epipen partout avec moi, même pour une balade de cinq minutes parce qu’on sait jamais. Et tant qu’à y être : « d’un coup qu’elle fonctionnerait pas », j’en traînerai deux. Tout mon entourage devait impérativement savoir que, chez moi,  les noix n’étaient plus les bienvenues. M’abstenir d’en manger au travail, de peur que les miettes lui tombent dans la figure quand je le prendrais dans mes bras à la garderie. Éviter les produits cuisinés, les desserts achetés avec des « possibilités de traces de noix », les « je pense pas qu’il y en ait ». On allait devoir changer un peu notre conception du mot manger. Avec un enfant allergique, le peut-être n’est malheureusement pas une option.
 
Dans le type parano, je laisse déjà pas ma place. Cette allergie n’allait pas améliorer les choses. J’allais maintenant vivre sous le mode : alerte Amber 24 heures sur 24. Qu'allais-je faire des aliments qu'il n'avait pas encore ingérés et pour lesquels, donc, il n'avait pas encore été testé? J'allais devoir attendre le prochain rendez-vous pour poser mes questions, sinon pour le moment, ma meilleure option était de l’amener faire un pique-nique sur le plancher de l’urgence de Sainte-Justine pour lui faire essayer.
 
Et vous, devez-vous vivre avec la triste réalité des allergies alimentaires?