Elle est partie. C’est de sa faute. Non, c’est la nôtre. Je ne le sais plus. C’était une peur enfouie. Mais pas assez pour l’enterrer pour vrai, t’sais, pour ne pas qu’elle sorte. Ça s’est produit devant nos yeux, sans raison. C’est ça qui fait mal.

Notre chienne a tenté de mordre notre fils, violemment. Quand je dis tenter, je veux dire qu’elle a réussi, mais qu’aucun dommage n’a été causé parce que c’était contrôlé comme attaque. C’était comme une attaque douce… Comme si elle savait qu’elle commettait l’irréparable. C’est une vieille fille de presque 9 ans, calme et affectueuse qui était avec nous depuis 5 ans et 3 jours. Elle s’est attaquée au petit nouveau de la meute. 10 mois d’ancienneté seulement. C’était trop.

J’entends les anti-abandon crier au scandale. C’est ben correct, vous n’étiez pas là. Vous n’avez pas vu. Moi, je le sais que fiston n’a pas tiré son poil, sa queue, sa patte… J’ai compris que cet acte pouvait et allait se reproduire et générer un drame. Il est passé à côté d’elle sans même la toucher ni la regarder. Ça ne lui a pas plu, clairement. Mon mari et moi, nous nous regardions comme si aucun de nous ne voulait dire ce que les deux savaient déjà. Même si nous savions que le choix était déjà fait, ce fut tout de même la décision la plus déchirante de notre vie.

Nous avons fait appel à un refuge qui offre une deuxième chance aux chiens séniors, chose que me tenait à cœur. Vu son âge, j’avais réellement peur qu’elle ne se fasse pas adopter et qu’elle croupisse dans le fond d’un box grillagé. Je braillais ma vie rien que d’imaginer. J’ai parlé avec une préposée au téléphone qui comprenait la situation et qui, en aucun temps, n’a jugé notre décision. Je n’avais pas envie de me faire sermonner sur le contrat éternel qui nous unissait à elle. C’était déjà trop dur.

Deux jours après l’avoir inscrite, elle a été adoptée. C’est comme si la vie nous confirmait que nous avions fait le bon choix. Je suis heureuse pour la personne qui l’aura dans sa vie, car je sais que ma chienne lui apportera autant de joie dans sa vie qu’elle en a apportée dans la nôtre. Je suis aussi contente pour elle qui sera aimée pour le reste de ses jours. Je trouve ça plus juste pour elle que de se faire toujours isoler de peur qu’une attaque beaucoup moins douce se produise dans notre maison.

La maison est vide. Nos cœurs aussi. Mais nos épaules sont un peu moins chargées. L’angoisse qui nous aurait habités si elle était restée avec nous pesait lourd. Je me sens plus légère… Peut-être parce que je dois avoir perdu 3 livres de morve et au moins autant de larmes. Merci pour ces cinq merveilleuses années ma Loup.
 


Laïka
Crédit : Sabrina Hurd