Je suis une adulte. Je crains parfois assez souvent, le regard des autres. Il m’arrive de ne pas faire une chose ou plutôt de ne pas la faire exactement comme je l’aurais voulu, de peur de me faire juger, qu'on rit de moi. Parce que, c’est bien ça que l’on craint, non? Que les autres rient, qu’ils ne nous aiment pas, qu’ils nous rejettent. Je m’empêche parfois d’aller acheter du lait en pyjama, de dire que, une fois de temps en temps, ça met mon cerveau à off d’écouter Yamaska. Je peux me retenir aussi de me gratter une fesse en public, juste au cas où… Et alors? Qu’est-ce que cela change dans ma vie? Pas grand-chose. Les chances sont que, je me coucherai quand même le soir heureuse et le cœur léger avec un bilan somme toute positif de ma journée.
 
Mais, qu’en est-il lorsque le regard des autres nous empêche d’exprimer quelque chose de viscéral pour nous? Quelque chose de fondamental. Qu’en est-il lorsque cette peur du ridicule et du rejet nous pousse à ne pas exprimer qui nous sommes réellement au fond de nous-même?
 
Le premier mois où mon Lilou a eu accès à une garde-robe de fille autant qu’à une garde-robe de garçon, nous avons découvert un nouvel enfant. Heureux, calme et serein avec ses robes et ses paillettes. Ce fut une lune de miel pour nous. Nous laissions derrière nous un garçon malheureux, colérique et tourmenté pour faire place à une fillette joyeuse, épanouie et apaisée.
 
Pendant un bon mois, sans interruption, il a été fille dans sa tenue vestimentaire à 100 % du temps. Puis, du jour au lendemain, il est retourné à 100 % garçon pour les vêtements. Bon… Il a exploré tout ce qu’il avait à voir. Il a fait le tour et peut maintenant tourner la page. La phase est finalement passée, nous nous sommes dit. Y aurait-il un peu d’espoir de ce côté???
 
Parallèlement à cela, les colères ont repris de plus belle. Notre enfant toujours si sage à l’école s’est mis à se faire réprimander, à présenter des comportements perturbateurs.
 
Notre Lilou n’avait pas terminé sa phase, il avait malheureusement rencontré le regard des autres… Ce même regard qui m’empêche moi-même de me rendre au dépanneur en pyjama, l’empêche lui d’être qui il est vraiment et de porter une robe pour aller au parc.
 
Je me sens désemparée face à cet apprentissage que j’ai à lui transmettre. Comment faire pour lui faire comprendre qu’il ne doit pas trop y accorder d’importance? J’ai mal à mon cœur de mère de me sentir incapable de faire en sorte qu’il ne se préoccupe pas des jugements. J’ai beau lui répéter que ce n’est pas important, que le principal c’est qu’il soit heureux, que si les autres ne sont pas contents, ils peuvent regarder ailleurs, cela ne fonctionne pas. Pourquoi? Parce que j’essaie d’apprendre à mon enfant à faire quelque chose qu’il m’est moi-même impossible de faire. Après tout, qui peut affirmer ne jamais s’en soucier? Ma tâche deviendrait-elle plutôt d’essayer de lui apprendre à vivre avec le jugement des autres tout en se permettant de faire ses propres choix?
 
Et vous? Votre enfant a-t-il déjà souffert du regard des autres? Comment avez-vous réussi à l’aider à vivre avec?