Crédit:Geneviève Tremblay

S’il y a une histoire que mon beau-père m’a racontée dans les dernières années, c’est bien celle où mon chum a déboulé les escaliers alors qu’il avait à peine un an. À chaque fois qu’il en parle, je comprends la frayeur qu’il a ressentie 30 ans plus tôt. Il s’en souvient comme si c’était hier. Mon chum avait, par la suite, été dans les vapes quelques minutes.

Ce genre d’histoires d’horreurs, nous les entendons en nous disant que ça ne nous arrivera pas à nous. En nous disant qu’ils ne sont pas chanceux. Voyons, on va le surveiller dans les escaliers, il va y avoir une barrière pour l’empêcher de tomber.

Mon fiston a déboulé les escaliers au printemps dernier. Il avait 18 mois. Je l’ai vu débouler les marches une à une et je n’ai pas pu faire quoi que ce soit pour l’en empêcher. Je m’en veux encore, heureusement, il s’en est tiré sain et sauf.

Voilà l'histoire : un samedi matin, fiston est venu avec moi dans la chambre conjugale. Je l’avais à l’œil et tout allait bien. Au moment de redescendre au rez-de-chaussée, allez savoir ce qui s’est passé dans sa tête, il s’est littéralement lancé dans les escaliers. Je tenais sa p’tite main mais, gravité aidant, je n’ai pas pu le retenir. Il a déboulé en un temps record les 15 marches qui nous séparaient du sol.

J’ai tellement crié que j’en ai eu mal à la gorge pendant des jours. J’ai tellement pleuré, j’étais en état de choc. J’ai eu le temps de m’imaginer un millier de scénarios qui finissaient mal. Et puis, mon chum m’a demandé de me calmer en me montrant mon garçon qui, étonnamment, allait bien. Je n’avais pas imaginé que ça pouvait juste finir comme ça. Il n’avait rien, rien d’apparent du moins.

Ce matin-là, je changeais nos lits et j’avais tiré les draps en bas des escaliers pour les mettre dans la laveuse. Fiston a donc fini sa course folle enroulé dans les draps, ce qui a amorti le coup. 

Nous avons passé la journée à l’urgence par précaution, pour s’assurer que tout irait bien. Il était de bonne humeur, le personnel infirmier sur place avait du mal à croire qu'il venait de débouler les marches. Il mangeait, il riait et il marchait dans les couloirs, à notre grand bonheur.

Cette fois-là, j’ai eu vraiment peur et je me suis trouvée particulièrement nulle. Dans les semaines qui ont suivies, les gens autour de nous nous ont raconté leurs mésaventures. Un petit qui glisse dans le bain, un autre qui tombe en bas d’un sofa. Des nez qui saignent, des bleus sur les fesses. Je me suis sentie moins seule et j’ai réalisé que, même si nous les aimons de tout notre cœur et que nous souhaitons les protéger au max, nous ne sommes jamais à l’abri d’un bête accident.

J’ai eu du mal à chasser l’image de ma tête. J’ai l’impression que je serai finalement comme mon beau-père et que je raconterai cette histoire à qui veut bien l’entendre!