Par un matin d’automne, je suis tombée sur cet article et sur l’étude qui l’accompagne. J’ai pensé à la course folle de la vie d’un parent sprinteur. À ce rythme infernal qu’on s’impose.

Je mentirais si je disais que je me suis reconnue dans ce texte. Au contraire. Je n’ai jamais aimé la course. Je suis plutôt de ceux qui marchent, tranquillement.

Le jour où mon fils est né, j’ai compté les années qu’il me restait, au mieux, à vivre. C’est terrible comme pensée, je sais, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Face à la déferlante de mon amour, le chiffre m’a paru ridiculement petit. J’aurais voulu être éternelle.

À ce moment-là,  j’ai choisi le temps.
 


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Depuis plus d’un an, nous n’avons plus d’horloge à la maison. Les jours se sont incarnés dans le corps d’un petit garçon. Les heures se comptent en taille de pyjama à pattes.

Choisir le temps, c’est prendre la décision réfléchie de prolonger mon congé de maternité pour une durée indéterminée. C’est choisir les longues matinées à paresser. C’est faire la sieste face à l’étang du Jardin Botanique, alors que l’été a volé un après-midi à l’automne. C’est être le témoin privilégié de tout : les pas, les mots, les prouesses, les crisettes, les découvertes…

Bien sûr, il y a des jours où le temps s’étire au-delà du possible. Le doute, ou pire, l’ennui, prend toute la place. Le portefeuille nous rappelle l’ampleur de l'effort. Mon « moi » productif piaffe d’impatience. J’entends la rumeur, je voudrais me jeter dans la mêlée.  Puis, je me rappelle.

J’ai choisi de vivre ces instants précieux, dérobés à la marche du monde.

Je rêve tout haut que chaque parent qui souhaite goûter à la lenteur puisse être en mesure de le faire, à l’abri de tout soucis. Et sans avoir à faire face à ces regards qui interrogent, qui jaugent, qui jugent.  Ça a quelque chose de louche, de nos jours, d’avoir envie d’être un parent à la maison. Comme si on souffrait du pire mal qui soit en ce siècle : la paresse.
 


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C’est sans doute la raison pour laquelle les gens que j’aime ne peuvent s’empêcher de me poser systématiquement LA question : « Quand est-ce que tu retournes travailler? » Ou mieux : « C’est quoi tes projets? » Comme si élever un enfant à temps plein ne pouvait être un projet en soi.

C’est sûrement pour ça aussi qu’un inconnu dans un café ose demander directement à mon fils « Pourquoi il n’est pas à la garderie, lui? »
 


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Je ne suis pas dupe. À la vitesse à laquelle tourne la Terre de nos jours, il viendra bientôt ce moment où je reprendrai ma place dans le grand sprint mondial. Mon fils aura grandi. J’aurai alors quelques minutes à moi.

Il restera le souvenir de ces journées douces et folles vécues au rythme de mon petit garçon. 

Quelle est votre vitesse de croisière en ce moment?