J’ai peur de ce que je vais écrire dans les prochaines lignes. Parce que du moment où les mots seront posés sur la page, ça deviendra une réalité, ça prendra forme, ça existera en dehors de ma tête et de mes angoisses.

C’est une maman que je connais. C’est une amie.
Elle a deux jeunes enfants, comme nous. 6 et 10 ans.

Elle le sait maintenant depuis quelques semaines. Les spécialistes le lui ont confirmé. Le vrai nom de sa maladie : la sclérose latérale amyotrophique.
Vous savez, cette maladie pour laquelle tout le monde sur les réseaux sociaux se jetait un seau de glace sur la tête sans toujours trop savoir pourquoi (ice bucket challenge).
ice bucket challenge

Crédit : Giphy

C’est ça, que dire d’autre? Je n’ai pas envie d’écrire les détails, les statistiques, comme on dit. Comme le temps de vie qui lui reste, comme toutes les étapes qui s’en viennent, comme toutes ces larmes qui seront versées par elle, par ses proches, par ses enfants. 

Je ne sais pas non plus quoi lui dire encore. Je me suis surprise moi-même à l’éviter du regard cette semaine, en la croisant à l’école de nos enfants. 
Qu’est-ce qu’on peut dire à une femme, une conjointe, une mère surtout, qui doit maintenant préparer son départ, son chemin vers une prison corporelle sans retour, du mieux qu’elle le peut, le plus sereinement possible? J’ai envie de lui dire que je serai là pour l’aider, qu’elle peut compter sur nous. Mais je n'en suis pas capable. Encore pour la même raison pour laquelle je ne veux en parler : ça va exister pour vrai, ça prendra forme. Et je ne veux pas ça.

C’est fou comment, tout à coup, mes petits problèmes irritants de la vie quotidienne me semblent insignifiants.

Je suis tellement troublée. J’ai tellement peur. J’ai beau me dire que non, c’est impossible, mais ça l’est. J’ai beau me dire que, de chaque épreuve de la vie, une belle chose finit toujours par en ressortir, mais cette fois-ci ça ne fonctionne pas. Ça ne fait aucun sens.

J’ai beau essayer de balayer les images de cette fin qui sera inévitable, souffrante, triste, injuste surtout, tellement injuste. Tellement injuste. Tellement injuste. Tellement injuste. 

Mon dieu.