Je suis maman depuis 4 ans

Dolores m’est rentrée dedans sans avertir. J’étais en dépression, je venais de passer le pire six mois de ma vie et je venais de déménager chez mon chum. Je devais dealer avec un retour à l’école, le site de Ton Petit Look et un travail à temps partiel dans une boutique de vêtements qui me servait plus à m’acheter du linge que d’autre chose. J’avais 26 ans. La journée où on s’est dits qu’on allait de l’avant, mon chum a perdu sa job. S’en sont suivis des mois à galérer avec les sous et l’anxiété de devenir mère. J’étais malade comme un chien.

Ça a pris trois heures et demie accoucher. Ça m’a pris deux secondes et quart pour tomber en amour avec la petite chose qui sentait le beurre dans mes bras. J’ai eu tellement peur quand je suis revenue à la maison avec elle. Est-ce que j’allais arriver à être une bonne mère? Comment faisait-on pour ne pas scrapper son enfant avec nos issues d’adulte. Je n’ai jamais arrêté de travailler sur le site et je suis retournée à l’école tout en allaitant mon enfant toutes les deux heures. J’ai eu les seins qui coulaient dans mes cours, et pas mal de trous de mémoire pour les notions que j’essayais d’apprendre.

Dolores est entrée à la garderie à 6 mois. J’ai versé une larme de soulagement quand j’ai été la porter le premier matin. J’avais l’impression d’abandonner mon enfant, mais en même temps, je pouvais prendre une douche chaude tranquille. Very mixed feelings.

Dolores a grandi vraiment vite. Elle était hors charte. Elle ne me ressemblait pas physiquement, même encore aujourd’hui. Le temps m’aura donné raison, car son tempérament semble coller à moi comme une vieille gomme sur une chaussure. Je regarde maintenant ce qu’elle est devenue et par quoi nous sommes passées : une deuxième dépression, la chance d’avoir ma sœur jumelle et son cousin d’amour vraiment présents, mes beaux-parents qui sont à des milliers de kilomètres, nos voyages, ses premiers souliers, bottes d’hiver, des costumes d’Halloween, ses premiers pas, ses premières dents, les fois où elle a été malade, etc.

Je regarde en arrière et je ne changerais rien. Souvent, le soir, quand on se raconte nos journées, on se met à parler de tout et de rien. Chaque fois, je dois réprimer mes yeux pleins d’eau de fierté. Quel beau brin de fille elle est en train de devenir. Malgré ses jokes qui n’ont pas de punch (comme sa mère), malgré les crises qu’elle fait encore parce que ses toasts ne sont pas coupés dans le bon sens, je me dis que je suis chanceuse d’avoir une fille comme elle.

Ce soir, on va manger des petits fruits ensemble et danser sur Despacito. Ma fille qui a 4 ans, son petit frère d’amour, son papa et moi. Ce soir je vais me coucher et ma fille aura 4 ans. Ça fait 4 ans que je suis maman. Pis je suis contente.