C’est arrivé doucement, simplement. Ma fille devait avoir deux ans et demi, mon fils, quelques mois.  Je ne m’y attendais plus, et je ne l’ai pas vu venir, mais voilà c’est arrivé : j’ai fait la paix avec ma maternité.
 
Ça faisait plus de deux ans que je bataillais. Avec mon rôle, mon identité, ma place, mon quotidien. Je me souviens, un jour que ma fille avait 15 mois, j’avais aperçu mon reflet dans un miroir et je m’étais demandée : « Mais qui est cette femme ? ». J’avais du mal à me reconnaître dans la maternité. Je vivais difficilement tous les changements de vie qu’elle amenait. Tout ce que je m’étais imaginé – que j’allais être une mère aimante, indépendante, différente (surtout pas une « maman » comme les autres), que j’allais maintenir mes activités, que je n’allais pas me laisser envahir par mes responsabilités et que j’allais être capable de mettre mes limites – rien de tout ça ne m’arrivait. J’étais dépassée, envahie, fatiguée, j’étouffais dans mon quotidien. Et je me sentais terriblement seule, terriblement.
 

Crédit : Pixabay

J’y pense et en fait, c’est comme si à cette époque, j’avais l’impression de subir ma maternité. Mon chum était alors très pris par le travail, il quittait parfois la maison pour plusieurs jours. Je me souviens que certains soirs où j’allais chercher ma fille à la garderie, je comptais les minutes avant l’heure du coucher. « Seulement 18 h 05? Mais comment vais-je passer à travers les 40 minutes avant le bain? »
 
Eh puis, un beau jour d’été où nous étions au chalet familial – ma fille s’amusait à lancer des cailloux dans le lac, moi je berçais mon nouveau-né sur le balcon – je l’ai senti, comme un baiser déposé doucement au creux de mon cou, comme une certitude discrète, mais tenace, qui avait poussé au fond de moi. J’étais en paix. J’étais bien. Je me suis dit : « Je suis mère, et je suis moi, et je suis heureuse. Je suis une mère heureuse ».
 
Wow.
 
J’écris ça et c’est comme si je suis encore incrédule. Pourtant, jamais ce sentiment ne m’a quittée depuis.

Il y a beaucoup de choses qui expliquent l’arrivée impromptue de cette paix dans ma vie de petite mère. D’abord, à la naissance de notre deuxième enfant, mon chum a pris six mois de congé parental. Cela a suscité une complète réorganisation de nos rôles familiaux, et a permis un repartage réel de la charge mentale (oui, oui, ça se peut !). Mon chum s’est approprié un tas de tâches d’organisation que j’effectuais seule par habitude, et cela a permis que je me repose enfin un peu. #MerciRQAP
 
Aussi, avoir un deuxième enfant m’a apporté beaucoup de confiance. Je me suis rendue compte que j’avais appris avec l’expérience, et que j’avais maintenant des repères pour me guider à travers les tétées groupées, les pleurs inconsolables, la répétitivité des tâches, les nuits et les journées sans sommeil, le don de soi demandé, les imprévus et les changements de plan, etc.
 
Et puis, aussi, il y a l’écriture. J’avais commencé à écrire, sur mon blogue et ici sur TPLMoms, et je pense que cet exercice de mise en mots m’a permis de m’approprier mon expérience, de la saisir et de la remodeler, pour ne plus la subir. En écrivant, en parlant aussi avec mes amies et mon chum, en sortant de moi tout ce que j’avais à dire sur mes difficultés et mes doutes, je me suis approprié ma maternité. Je l’ai faite mienne.
 
C’est une maternité bien imparfaite, tout à fait compliquée et un peu maladroite, mais c’est la mienne. Elle est belle et grandiose, sincère et chaleureuse. Elle m’emporte, et j’ai décidé de me laisser emporter, parce qu’elle me fait goûter un bonheur simple et passionnément amoureux, un bonheur partagé. Y a-t-il plus grand bonheur que celui que l’on partage avec les siens?
 

Moi pis les miens.
Crédit : Mathieu St-Onge

 
Avez-vous été bouleversée par la maternité ?