Chaque année, depuis environ cinq ans, les membres du personnel des différents établissements scolaires de la province reçoivent une formation sur les mesures de confinement. Je vais toujours me rappeler de la première formation que j’ai eue à ce sujet ; j’étais terrifiée. Nous étions toutes assises dans un local, les yeux grands, face à des policiers qui nous racontaient des faits vécus. Je ne pouvais croire qu’une ou des personnes pouvaient s’en prendre à des écoles, lieux remplis d’espoir et de savoir. J’étais bien naïve faut croire.

Tout comme les exercices d’évacuation en cas de feu, les formations sur les mesures de confinement sont malheureusement nécessaires. Le seul bémol est que jamais nous n’avons parlé de ces protocoles devant les élèves à la grande différence de l’alarme de feu. La différence est bien simple ; en cas d’incendie, il faut être prêt à sortir les élèves à l’extérieur, loin du danger, au point de rassemblement déterminé par l’école. Or, dans le cas d’une menace dite « humaine », les élèves doivent rester dans les locaux.

Cette semaine, une amie maman était bien en colère suite à une « simulation d’un tireur fou » qui avait eu lieu à l’école de sa fille. L’enseignant avait décidé d’enseigner à ses élèves quoi faire. Ok, peut-être que l’intention était d’être transparent avec les jeunes, mais les répercussions ont été grandement négatives par la suite. La petite, de nature anxieuse, a été traumatisée et ne voulait plus retourner à l’école le lendemain. Je la comprends à 100 %. Je suis une adulte et chaque fois que nous revoyons les protocoles, je viens les jambes molles et je suis aux aguets les quelques jours suivants.

Nos jeunes sont déjà assez bombardés d’images épouvantables, de gestes haineux, de guerres et d’insécurités, pouvons-nous, en tant qu’enseignant.e.s, tenter de préserver cette belle innocence le plus longtemps possible? Ils n’ont pas besoin de savoir qu’à tout moment, une personne peut venir dans leur école pour leur enlever le peu qu’il leur reste. Anyway, advenant qu’une réelle menace frappe l’école, l’enseignant.e fera tout en son possible pour que les élèves ne sachent pas ce qu’il se passe dans le but d’éviter une vague de désorganisations. Alors, à quoi bon leur en parler avant?

Certain.e.s d’entre vous pensez peut-être que les histoires de « tireurs fous » sont exagérées, voire existantes que chez nos voisins du sud. D’autres pensent peut-être qu’il faut arrêter de paniquer avec tout et que nous ne pouvons les protéger de toute menace qui plane autour d’eux. Perso, je suis dans les écoles depuis près de huit ans, mes parents enseignent tous les deux depuis plus de vingt-cinq ans et j’ai vu une grande différence quant à la vigilance des membres du personnel. Les écoles sont sécurisées davantage, le personnel est formé et prêt (même si la panique peut jouer des tours), les protocoles sont clairs et c’est beaucoup plus sécurisant ainsi.

Les mesures de confinement ne sont pas que pour le cliché américain du « tireur fou », elles sont également et dans la plupart des cas mis en place pour un parent qui débarque à l’école en furie parce qu’il a perdu la garde, pour une injonction de la cour, pour un parent qui vient chercher son enfant sous l’influence d’alcool ou de drogues, pour un élève qui est à boutte, pour un autre qui souffre d’un trouble de santé mentale et qu’étant donné les coupures dans les dernières années, n’a pas accès à suffisamment de services.

Alors, sortons-nous un peu la tête du sable, travaillons ensemble à protéger nos p’tits, mais de grâce, tentons de conserver l’image belle et pure de l’école, ils voient déjà assez d’horreurs à l’extérieur.