À l’adolescence, nous étions trois amies qui étions proches. Même si je ne voulais pas d’enfant à cette époque, nous avions toutes les trois une idée du sexe qu’aurait chacune de nous si nous fondions une famille. Pour ma part, c’était évident, autant pour elles que pour moi, que je n’aurais que des filles.

Quand mon envie d’avoir des enfants s’est concrétisée, j’avais encore le sentiment que je porterais une petite fille. Je n’avais aucune explication possible. C’était une impression forte, une évidence même. Disons que l’intuition féminine avait le dos large.

J’en étais tellement convaincue que je ne cherchais que des noms féminins. Si bien qu’à un certain moment je me suis demandé si ce n’était pas une envie plus qu’un pressentiment. Je me suis rappelé que j’y avais déjà réfléchi et que je m’étais juré de ne faire des enfants que si j’étais à l’aise avec la possibilité d’avoir un garçon autant qu’une fille.

Le jour de l’échographie est arrivé. Lundi, le 27 février, nous serions fixés sur le sexe de notre bébé. J’allais enfin pouvoir dire que j’avais raison et tout le monde serait ébahi par mon pouvoir divinatoire! Il a fallu commencer par mesurer tous ses membres, un à un, à deux reprises, en centimètres et en millimètres, en plongée et en contre-plongée. C’était interminable! (Du moins ça le semblait.) Le moment venu, bébé était assis sur ses genoux, les jambes soudées l’une à l’autre. Il nous faudra être patients. Et le moment arrive enfin, je la cite : « Et ici on voit son petit paquet…»

Je fonds en larmes. Instantanément. Mon amoureux reste là, bouche bée, incapable de comprendre pourquoi je suis si attristée. Tout en jubilant intérieurement que je n’aie pas raison. Puis, la question fatidique : « Tu es déçue? » Bien sûr que non! J’ai un magnifique garçon en santé dans mon ventre. Comment je pourrais être déçue? Et j’ai compris.

J’étais terrorisée. J’avais soudainement l’impression de ne plus savoir comment être maman. Je n’avais plus aucun repère. L'inconnu de cette aventure était soudainement décuplé par ce petit détail. Je ne savais tout à coup plus consoler ni bercer. Toutes les certitudes que j’avais n’étaient plus.

Et le temps a fait son œuvre. Je flattais mon ventre en imaginant mon fils et tout devenait naturel. Je réalisais, petit à petit, que ses besoins seraient les mêmes, que rien ne changeait. Je l’aimerais tel quel, comme il viendrait à moi, comme une maman, inconditionnellement.