Il y a eu de grandes noirceurs. Avant. Du temps où je ne m’appelais pas encore maman. Des jours fantastiques et des jours merdiques.

Des jours où, à court d’espoir et de courage, je ne me voyais plus remettre les pieds hors de mon lit. Comme il n’y avait pas ce petit bout de vie qui m’attendait de l’autre côté du corridor, la grande noirceur m’avalait, me consommait. C’est avec peine que je me disais que la vie valait la peine d’être vécue.
Dans mes jours fantastiques, j’y croyais. Dans mes jours merdiques, absolument pas.

Puis, il y a eu moins de noirceur. En fait, presque aucune. Grâce à une équipe médicale dévouée, extraordinaire, aidante. De la lumière, plein, et des passages nuageux, mais si peu. Quelques années plus tard, mon enfant est né. C’était une journée ensoleillée.

Si la fatigue accumulée, le post-partum ou la réalité d’être parent ramènent parfois une noirceur longtemps tenue à l’écart, il y a cette vérité qui a changé depuis qu’il y a un bébé qui m’appelle maman.
La vie vaut la peine d’être vécue, sans condition aucune.
La vie, il ne sera plus jamais permis de penser à me l’enlever même si ça m’était arrivé quelques fois y’a de ça de nombreuses années.

Je veux être là pour mon enfant, découvrir qui elle est, qui elle deviendra. Je veux qu’on se colle et qu’on se console encore longtemps. J’veux la voir souffler une bougie de plus, chaque année. J’veux lui apprendre une chanson à compter les orteils. J’veux lui servir un autre bol de Fruit Loops en cachette, même si c’est plein de sucre et de colorant, juste pour voir son sourire et ses p’tites dents.

J’veux être là pour mon amant. Notre team d’enfer qui rocke la routine de nuit, celle avant et après le coucher de la p’tite. J’veux qu’on puisse pleurer ensemble le départ de notre enfant : pour sa première journée d’école, sa première date, son premier appartement. J’veux qu’on radote l’histoire de notre rencontre en jouant à Mario Kart quand on aura 75 ans. J’veux qu’on débatte du menu de notre 50e anniversaire de mariage et qu’on décide que ça sera juste du St-Hubert pour tout le monde, finalement.

Plus que tout, je veux être là pour moi, pour m’émerveiller devant les petites et les grandes choses. Pour chanter faux sous la douche. Pour mettre des photos de bouffe sur Instagram et rire parce que j’ai même pas 10 likes. J’veux regarder le soleil se coucher et se lever dans tous les tons de toutes les saisons. J’veux voir le temps passer et jouer à ne pas vieillir trop vite contre lui. J’veux m’appartenir et le crier au monde entier.

Dans le cadre de la journée Bell Cause pour la cause ce 31 janvier prochain, j’avais juste envie de mettre en mots les désarrois humains qui surgissent quand, une fois parent, vient le temps d’être chaviré par nos taux de sérotonines fluctuants et nos traumas du passé.

La noirceur est peut-être là, prête à nous ravaler, cachée dans le coin entre le lit à barreaux et le tipi Pinterest. Causez, si vous le pouvez. Et si vous sentez la noirceur vous glisser des mensonges à l’oreille, appelez Info-Social au 811, consultez votre médecin ou criez à l’aide en composant le 1-866-APPELLE, partout au Québec.

La vie, parfois fantastique et parfois merdique, vaut la peine qu’on s’y accroche. C’est précieux, je l’ai appris de mon enfant. C’est fou c’qu’ils peuvent nous apprendre sans même avoir 2 ans.