J’ai toujours aimé travailler. Je n’ai pas toujours aimé mon emploi, comme tout le monde, mais le travail en tant que tel, oui. Je trouvais ma place un peu partout, j’arrivais à me démarquer et à me sentir bien.

J’avais 12 ans, 16 ans, 20 ans, 24 ans.

Je visais plus haut, je voyais plus grand. J’avais le sens du leadership, des idées de grandeur. Je rêvais de postes à la direction, de responsabilités, d’autonomie.

Le congé de maternité m’angoissait : et s’il venait nuire à ma carrière? Parce qu’on le sait bien, même si les employeurs comprennent (des fois) la réalité des nouvelles mamans, ils ne peuvent pas mettre l’entreprise sur pause pour autant.

Je n’anticipais pas le retour au travail, ni hâte ni détresse. Je savais que je m’ennuierais de mon fils, mais que je n’en serais que plus heureuse de le retrouver le soir venu. Je m’imaginais reprendre ma place, là où je l’avais laissée, peut-être même en mieux.

Pourtant.

Les choses ont avancé. Les choses ont changé. Un an, c’est si court et si long à la fois.

Au fond de moi, je le vois bien. C’est pas toi, c’est moi.

C’est moi qui ai changé. Changé mes priorités. Changé ma vision de la vie.

Ce qui était autrefois une urgence à mes yeux, un échéancier primordial, n’est devenu aujourd’hui qu’une tâche parmi tant d’autres, que je terminerai le lendemain si l’heure de la garderie sonne.

Je rêvais de postes haut placés. Aujourd’hui, je rêve qu’on m’oublie.

Les murs m’angoissent, l’ordinateur m’étourdit. Mes jambes refusent de suivre le matin. Mon cœur s’effondre le dimanche soir. Travailler dans un bureau me semble dérisoire et futile. Je me remets en question, ma carrière, mes choix, mes envies.

Serais-je plus heureuse dans un autre univers? Faut-il que les murs tombent pour que je m’épanouisse? Devrais-je tout repenser?

J’essaie de retomber sur mes pieds, de me laisser le temps. La routine, les changements au travail, l’ennui.

En attendant, j’embrasse mon petit homme matin et soir, et je me rappelle que le travail est secondaire, malgré les heures interminables qu’on doit y passer.