Peu de temps après ma deuxième grossesse, j’ai lu les travaux de recherche de Marie-Noëlle Bélanger-Lévesque sur la spiritualité et l’accouchement. Ma première réaction a été de me dire « Ah ouais, c’est un sujet d’étude? »
 
Nous sommes toujours prompt.e.s à juger les réalités des autres, surtout lorsque nous ne les connaissons pas, avant de regarder nos propres contradictions.
 
Mes contradictions familiales
Ma famille est catholique, mais mon père est reconnu pour arrêter le sang. Ma sœur possède la capacité de trouver une source d’eau où qu’elle soit. Nous donnons un sou noir à celui ou celle qui nous offre un couteau pour éviter le malheur.

Dans ma famille élargie, il y a des personnes qui pratiquent l’hypnose, le reiki, qui tentent de prédire l’appareil génital des fœtus avec une aiguille apposée sur la main, et j’en passe.
 

Crédit : Dani Costelo / Unsplash

 
Mes propres contradictions
Et je ne suis pas en reste. Moi, la mère qui n’a pas fait baptiser ses enfants. Moi, la femme rationnelle qui possède des diplômes.
 
Moi, la fille qui, après plus de deux ans à tenter de concevoir un enfant, s’est retrouvée à l’autre bout du monde devant un arbre de la fertilité. J’en suis venue à implorer une divinité, la déesse Kali, pour enfin devenir enceinte.
 
Ce n’était pas prévu. Nous visitions le temple de Kalighat à Calcutta. Lorsqu’un Brahmin nous a expliqué une tradition du temple, je me suis dit que j’en étais rendue là. J’ai demandé un enfant à Kali avec ardeur.
 
Quelques années plus tard, alors que je ne voyais plus la fin des problèmes de santé de mes petites, j’ai aussi demandé à mes défuntes grands-mères de veiller sur nous.
 
Des récits communs
Quand j’ai avoué à Geneviève mes supplications peu orthodoxes, elle m’a partagé qu’elle avait également pratiqué un rite de fertilité.
 
« J'ai grandi dans les montagnes de Charlevoix. Ma famille, comme celle de Johanne, a un petit côté “givré” et porte dans son histoire les superstitions d'un Québec “païen” aujourd'hui presque disparu. Toute mon enfance, je me suis levée à l'aube le matin de Pâques pour aller cueillir de l'eau qui guérit tout à la source, et j'ai été bercée par des histoires de voisines qui arrêtent le sang, de bonne aventure et de ramancheux.
 
Ces récits ont marqué mon imaginaire et même adulte, je suis du genre à jeter un peu de sel par-dessus mon épaule si j'ai le malheur d'en échapper sur la table.
 
Dans ces montagnes où j'ai grandi, quelqu'un a planté une statue de la Vierge Marie dans une baignoire au milieu d'un champ. Elle est là depuis toujours. Enfant, j'aimais aller lui porter un bouquet de myosotis, m'agenouiller et lui faire toutes sortes de demandes… Je ne l'ai jamais vraiment envisagée comme l'icône religieuse qu'elle est, plutôt comme un espèce d'ange protecteur dans une belle robe de plâtre bleue.
 
Un matin, il y a 4 ans, j'étais de retour dans mon coin de pays pour les vacances. J'ai suivi le sentier qui fait le tour du lac et sans y penser, j'ai cueilli un bouquet de fleurs sauvages. Et c’est là que je l'ai vue. Ma statue, immuable au milieu de son champ. Je me suis approchée et j'ai déposé le bouquet de fleurs à ses pieds, comme je l'avais fait si souvent. J'ai alors senti mon coeur formuler le plus profond des souhaits que j'ai jamais fait. Je n'ai pas osé lui demander directement. Qui étais-je, après tout, pour souhaiter si grand? J’étais gênée alors je lui ai dit quelque chose comme : « Toi, tu es une maman, tu comprends, tu sais ce que je veux. »

Crédit : Grant Whitty / Unsplash

 
Le mois suivant, j'étais enceinte. Hasard ou coïncidence? Quoi qu'il en soit, l'été suivant, j'ai senti le besoin d'aller lui porter le plus beau des bouquets de fleurs, et d'aller lui présenter mon bébé tout frais, le coeur plein de gratitude. »
 
Et vous, est-ce que votre désir de parentalité ou ses défis vous ont amené à pratiquer certains rites spirituels ou païens?