D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu de la misère à faire mes deuils. Je process lentement les informations et j’ai tendance à me faire envahir par des pensées qui tournent en boucle dans ma tête. Je me souviens de la mort de ma tante Annie, seule dans son bain d'une maladie autre que celle que j'ai dans ma tête quand j'avais 8 ou 9 ans. Je me souviens comment je m'étais tournée vers des cassettes de la bible que j'écoutais dans mon Walkman. Ça m'avait pris du temps parce que je ne savais pas quoi chercher comme réponse à la question « Pourquoi le monde meurt? » ou à  « Comment je peux empêcher ça? » La vérité, c’est que je n’ai de pouvoir sur personne. La vérité, c’est que je ne peux pas empêcher le monde de mourir. Pis ça, j'ai encore de la misère à le comprendre. Parce que j'ai déjà essayé de me suicider, pis que je dois, en plus de faire le deuil du monde qui meurt, faire le deuil ne plus jamais avoir une vie sans ce sentiment-là. 
 
Mais je peux continuer de parler du suicide pour le prévenir.
 
Quand quelqu’un se suicide, j’ai l’impression d’avoir fail quelque part. J’ai l’impression tout le temps mon message : « ça finit par bien aller. » n’a pas marché. Pourtant, je le sais que ça aide du monde, plein de gens me parlent de ses pensées négatives, j’essaie de trouver le plus d’info et d’aide dans le moyen de mes ressources. Je montre le chemin vers les endroits qui ont l’air plus loin qu’on pense quand ça va mal.

Mais le monde continue de mourir. De se donner la mort. Pis je continue de penser que j'ai fail quelque part et que c'est de ma faute, tout en sachant que tout ne tourne pas autour de moi (lol).
 
Cette semaine est la semaine de prévention du suicide. En gros, pour moi, c’est une semaine quand même difficile. Parce que même si le taux de suicide a diminué l’an dernier, ça arrive trop souvent, encore. Par exemple, cette année, plusieurs initiatives ont été mises à l’œuvre, que ce soit ça va bien ou parler du suicide. Deux façons de trouver un peu plus d’aide quand tout ne tourne par rond.
 
J’ai beau être chamboulée chaque fois qu’on me dit que quelqu’un que je connais a décidé de mettre fin à ses jours et de me sentir mal à chaque fois que je parle de ma tentative, je continuerai de le faire passer le message que c’est une décision définitive pour des problèmes temporaires et que c’est de la faute de personne autour. La seule chose qu’on peut faire collectivement, c’est d’écouter les gens qui ne vont pas bien et de leur pointer les ressources pour trouver l’aide adéquate parce que pour l'instant, on peut pas encore avoir toutes les ressources nécessaires pour faire de notre société une place safe pour les personnes qui souffrent de maladies mentales. C'est important de rappeler à ces personnes-là qu'il y a plusieurs chemins pour aller mieux, pis c'est un travail collectif de faire passer le message qu'on peut trouver de l'aide.

C’est pas une simple tâche, mais c’est une tâche que je vais m’efforcer de faire tant que des gens penseront au suicide.
 
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