Quand j’étais enceinte de mon deuxième enfant, nous avions décidé mon chum et moi de nous payer une séance de préparation à l’accouchement avec une accompagnante à la naissance. Nous voulions surtout nous rafraîchir la mémoire sur les points de pression à exercer pour tempérer la douleur, et je voulais aussi discuter un peu de la poussée (que je n’avais pas « sentie » au premier accouchement, étant sous péridurale). 
 
Quand l'accompagnante est arrivée chez nous, la première chose qu'elle nous a demandée a été de raconter mon premier accouchement. Alors nous nous sommes fait plaisir, mon chum et moi, et nous avons raconté en long et en large la naissance de notre fille, comment ça avait été merveilleux, magique, incroyable, etc. Elle nous a écoutés attentivement, puis, quand nous avons terminé, elle nous a dit, souriante et directe : « Ok, maintenant que vous l’avez racontée, je vous invite à déposer cette première expérience ici, dans cette pièce, et à la laisser derrière vous. Parce que le deuxième accouchement sera tout sauf comme le premier. Ce sera une tout autre expérience, surprenante et inattendue, ce sera complètement différent ».
 
Elle a tellement bien fait de nous le dire, de nous y préparer. Elle avait absolument raison. 
 
Mes deux accouchements ont été complètement différents. Le premier a été long et tortueux (27 heures de travail actif, dont 4 heures de poussée, précédées par 15 heures de latence), alors que le deuxième a été rapide et déchaîné (2 heures 40 de travail actif, une demi-heure de poussée, à peine de latence). Autant nous avions construit une profonde connexion, mon chum et moi, lors du premier, autant nous n’avons comme pas eu le temps pendant le deuxième, qui fut pour moi une expérience plus solitaire (ce que j’ai par ailleurs beaucoup aimé). Malgré le fait qu’il venait régulièrement me dire des mots doux, mon chum était plus occupé à des tâches parallèles (réveiller notre grande et l’amener chez les voisins, accueillir les sages-femmes, s’occuper d’arranger la chambre).
 
Mais c’est surtout dans mes sensations, et dans la tonalité de mon expérience que la différence fut plus marquante. Lors de mon premier accouchement, j’étais beaucoup dans les symboles, j’avais plein d’images en tête, qui me transportaient et m’habitaient, qui donnaient sens à la douleur et qui l’apaisaient. Lors du deuxième, j’avais beau tenter de me concentrer sur des images, rien n’y faisait : j’étais draguée dans la sensation pure, comme si chaque seconde qui passait n’existait que pour elle-même, comme si l’intensité emportait toute pensée qui aurait pu émerger de cette expérience totalement corporelle, charnelle… C’était vif et franc, ô combien douloureux, et incroyablement puissant. C’était vraiment différent. 
 
Je ne peux pas dire que j’ai préféré l’un ou l’autre de mes accouchements. Le premier était doux et initiatique, épuisant et exaltant. Le deuxième était explosif, passionnel et drainant, volcanique, presque. Les deux ont été merveilleux, chacun à leur manière, dans le jeu entre amour et douleur, seuil et passage, accueil et abandon qu’ils ont instigués. Ils m’ont chacun amené un enfant à découvrir et à aimer, chacun une nouvelle maternité à m’approprier. Je chéris leur souvenir comme des petits trésors.
 
Avez-vous eu des expériences différentes lors de vos accouchements?

Pour lire mes récits d’accouchement : voici le premier, partie 1partie 2; et pour le deuxième c’est par ici.