Marlihan Lopez est vice-présidente de la FFQ aux pratiques solidaires et anti-oppressives, est impliquée dans le collectif du peuple et est présidente de Paroles de femmes, organisme qui crée des espaces pour libérer la parole des femmes racisées dans des contextes sécuritaires. Bref, c’est une femme engagée, une citoyenne qui occupe la place publique et une maman. Je lui ai posé quelques questions.

Combien d’enfants as-tu et quel âge ont-ils?
J’ai un fils de 7 ans.

Comment est née ton envie d’être une citoyenne active?
C’est venu à cause de mes expériences. J’ai déménagé à 5 ans aux États-Unis et j’ai réalisé que j’étais différente à travers le regard des autres. J’ai été confrontée très tôt au racisme. En troisième année, j’ai refusé de faire le pledge of allegiance parce que je n’étais pas américaine. J’ai toujours eu cette sensibilité à l’injustice.

Est-ce que tu trouves ça plus difficile de t’impliquer qu’avant d’être parent? Comment est-ce que tu surmontes les obstacles à ton implication?
Ce n’est pas pas plus difficile, mais différent. Je l’inclus, il m’accompagne aux manifs, aux réunions. Ça fait partie de moi. Au début, je le faisais surtout garder, mais j’ai ensuite décidé de l’inclure, d’adapter aussi la façon dont je milite.

Est-ce que l’expérience de la parentalité a changé ta vision du monde? Comment? 
On se retrouve responsable d’une personne sans défense, dans des situations dans lesquelles on se sent vraiment impuissant et vulnérable. Mon fils est un enfant neurodivergent asperger, et j’ai beaucoup appris avec lui. Avant, j’avais certains comportements capacitistes. J’ai appris à remettre en question ce qu’on considère comme la norme. À accueillir, valoriser la neurodiversité. Ça m’a rendue plus solidaire, plus mature émotionnellement aussi.

Est-ce que ton enfant suit ton exemple de citoyenne? Qu’aimerais-tu lui transmettre de cette flamme qui t’anime?
En tant que parent, on veut que nos enfants soient meilleurs que nous. Je ne m’attends pas à ce qu'il fasse la même chose, mais j'espère qu'il va acquérir cette sensibilité, qu'il ait de l'empathie, qu'il soit solidaire contre les injustices, même s'il ne les vit pas. Le plus important, c'est qu'il soit un bon être humain.

Qu’aimerais-tu laisser comme monde à ton enfant?
Je ne sais pas si on peut à nous seuls laisser un monde meilleur. Quand on vit beaucoup d'injustices, d'oppressions, notre cœur s'endurcit. Des fois, on devient cyniques. Je sais qu'il va affronter, en tant que petit garçon noir neurodivergent, beaucoup de défis. J'espère lui donner les outils pour qu'il passe au travers et que ça ne mine pas sa flamme, sa capacité d'être solidaire. 

Quels conseils aurais-tu pour les parents qui souhaitent s’impliquer activement?
J'aimerais leur dire que ça ne s'arrête pas automatiquement avec les enfants (le militantisme), de ne pas sous-estimer les enfants. J'espère que son enfance en milieu militant va lui donner des outils pour affronter ce monde injuste, laid, difficile. C'est un pouvoir d'éduquer vos enfants dans ce parcours. Par contre, on fait plus attention : je suis la cible d'attaques en tant que militante, donc je fais très attention aux photos de mon fils, aux médias sociaux, je le protège.